Pouvoir divin
Rubrique
Dans le christianisme médiéval, tout pouvoir procède de la puissance divine, attribut ontologique de la divinité. L'idée de « toute-puissance » de Dieu est essentielle à la foi chrétienne. Bien que les termes de « puissance » et de « pouvoir » soient très proches dans leur emploi, on peut les distinguer en disant que le terme de pouvoir désigne la puissance utilisée à une certaine fin. La puissance, démiurgique, universelle et mystérieuse, participe de la nature divine, tandis que le pouvoir et l'autorité procèdent de Dieu et peuvent être délégués. Si la signification des mots puissance, pouvoir et autorité varie selon les périodes, ils participent tous de l'expression de la domination de Dieu sur l'homme.
Le pouvoir tel qu'il se conçoit dans le christianisme médiéval est en partie l'héritier des théories politiques romaines antiques et de celles des exégètes de la fin de l'Antiquité et du haut Moyen Âge. Sa terminologie trouve sa source dans le langage juridique romain. La notion d'autorité est héritée de l'auctoritas romaine, qui désigne le pouvoir moral et spirituel, et s'oppose à la potestas, qui désigne le pouvoir temporel.
Cette conception du pouvoir est théorisée dans une lettre célèbre du pape Gélase à l'empereur Anastase en 494, et se manifeste par la distinction auctoritas/potestas, fondement de la doctrine gélasienne du pouvoir, en vigueur durant une bonne partie du Moyen Âge à partir du règne de Louis le Pieux. Néanmoins, à partir du XIIe siècle, la conception du pouvoir évolue avec le renforcement de l'autorité papale, qui se pense comme une autorité politique théocratique. L'autorité déléguée par Dieu s'exerce sur terre selon la théorie des deux pouvoirs ou des deux glaives, formalisée par Bernard de Clairvaux : un pouvoir d'essence spirituelle détenu par les prophètes et les prêtres et un pouvoir d’essence politique détenu par le souverain. Elle suppose une alliance étroite entre les deux pouvoirs, et une subordination du politique au spirituel. La loi laïque est soumise à la loi ecclésiastique selon le schéma augustinien des « deux cités » (La Cité de Dieu).
La conception médiévale du pouvoir se nourrit aussi du concept biblique de royauté. Institution détentrice du pouvoir dans l'Orient ancien, la royauté s’incarne dans les rois d’Israël de l'Ancien Testament. Mais ces rois peuvent s’éloigner de la loi divine. L’ère du Royaume de Dieu s’ouvre avec l’arrivée du Messie, annoncée par Jean-Baptiste (Mt 11, 12 et suivants). À la toute-puissance de Dieu qui fonde la théologie vétérotestamentaire, s’associent désormais, dans la théologie chrétienne, les deux thèmes de la royauté du Christ en tant que Messie (Mt 21, 1-11) et du Royaume de Dieu, dont le Christ proclame la Bonne Nouvelle (Mt 4, 23 et 9, 35) et qui se réalisera pleinement à l’horizon eschatologique.
La rubrique envisage dans un premier temps la question de la puissance divine, source de toute autorité et de tout pouvoir sur la Création, qu’il soit de nature démiurgique ou destructrice, et que l’on traite de l’ordre naturel des choses ou de phénomènes miraculeux. On déclinera ensuite la situation du pouvoir divin sous deux formes : celle du royaume, d’origine céleste (règne céleste) et celle de l’Incarnation (royauté du Christ). Quant à la délégation de ce pouvoir, on distinguera la consécration divine du pouvoir temporel exercé par les rois sur leurs sujets (royauté terrestre) et la délégation de l’autorité, qui confère un pouvoir de nature spirituelle à son récipiendaire.