Amour de soi

Thématique iconographique

L’alliance que Dieu établit puis restaure avec l’humanité peut être enfreinte. En créant l’être humain homme et femme et à sa ressemblance (Gn 1, 26-27), Dieu lui confère la capacité de choisir entre le Bien et le Mal, et donc de mal agir (saint Augustin, De libero arbitrio I, XVI). Cette liberté ontologique de la créature par rapport à son créateur est mise à mal par la tentation du serpent, qui invite les humains à la désobéissance en les convainquant qu’ils ne mourront pas et seront semblables à Dieu. Sitôt le péché commis, les humains se savent nus, c’est-à-dire qu’ils se voient sans l’image de Dieu qu’ils portent en eux, comme des animaux (Gn 3,7). De cette disparition de Dieu, qui restera hors d’atteinte dans le récit avant l’Incarnation, naît un attachement de la part animale à la matière, et en premier lieu la sexualité charnelle. Ne subsistent, comme source et comme objet d’amour, que l’animal et sa chair prise dans la loi d’une vitalité déraisonnée qui s’exprime d’abord dans les pulsions du corps. Contrairement à l’amour en Dieu, cet amour est fait de concupiscence : « N’aimez ni le monde ni ce qui est dans le monde. Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est pas en lui. Car tout ce qui est dans le monde – la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la richesse – vient non pas du Père mais du monde. Or, le monde passe avec ses convoitises, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement » (I Jn 2, 16-17). Cette convoitise ontologique se déploie en grandes catégories peccamineuses, les péchés capitaux qui, dans une nomenclature progressivement établie entre l’époque paléochrétienne et sa fixation par Thomas d’Aquin, sont au nombre de sept : l’orgueil, qui est l’amour exclusif de soi, la gloutonnerie, la paresse, la luxure, l’avarice, la colère et l’envie. Les conséquences sociales de ce détournement de l’amour divin sont considérables : il rompt le lien de fraternité, avec toutes les altérations et violences sociales qu’entraînent mensonges, violences et trahisons ; plus avant, il rompt le lien entre l’humain et la vie qui lui a été donnée par Dieu, ce que les moines manifesteront en associant au péché de paresse physique, une absence d’engagement dans la foi, l’acédie.


Rédaction

Camille Ambrosino / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud


Pour citer la page

Collectif OMCI-INHA, Camille Ambrosino / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud, « Amour de soi » in Ontologie du christianisme médiéval en images, consulté le 21 novembre 2024, https://ocmi.inha.fr/s/ocmi/item/1140