Orgueil
Motif iconographique
Orgueil, figuré sous les traits d’un personnage juché sur les épaules d’un second, Flatterie, est une claire référence à la position de domination que les montures confèrent aux chevaliers dans le monde médiéval. L’analogie est renforcée par la présence dans ses mains d’un grand cor de guerre ou de chasse, l’olifant, et sur sa coiffe, d’une corne de « licorne » (de narval) qui remplace la lance attendue. La figuration est ironique et extrêmement critique. Orgueil ne brandit il pas, dans le même temps, un gros gourdin que l’on rapprochera assez naturellement de celui que Caïn a utilisé pour tuer son frère ? Quant à Flatterie, elle est courbée sous le poids d’Orgueil, et admire son image dans le miroir rond qu’elle tient face à elle.
L’orgueil, celui qui conduisit Adam et Ève à s’imaginer être des dieux, est la source du mal et de l’ensemble des péchés dans le christianisme ; Guillaume de Diguleville dit même de lui qu’il précède le premier péché car il est le péché de Lucifer. Toujours selon le texte, il est fait de vanité : la corne marquant les orgueilleux, mais aussi ce « soufflet de vaine gloire » qu’est le grand cor dans lequel il souffle. Il est aussi fait de cruauté, dont témoigne le mépris d’Orgueil pour sa monture, et d’une violence fratricide, dont atteste le gourdin. La flatterie lui sert de monture, puisqu’elle le porte de l’avant en faisant enfler sa démesure et c’est sa propre image illusoire qu’elle lui donne à voir. L’orgueil, cet amour de soi produit par un total aveuglement à Dieu, ne produit donc rien d’autre qu’un immense et dangereux aveuglement à soi-même aux effets malfaisants.